Village de Rihu, quelque part au milieu de forêts de sapins et d’innombrables lacs finlandais. Dans un champ balayé par le grand vent scandinave, Mathilde désherbe une ligne de carotte à la main. Avant son départ pour la Finlande, une amie lui a demandé : « tu vas vraiment aller travailler gratuitement ? ». Ce n’est pas en ces termes que Mathilde décrit son engagement. Pour elle, il s’agit d’un volontariat de deux semaines pour un projet qui a du sens, celui de la ferme biodynamique Toivo située à 170 km d’Helsinki.
Nous avons rejoint Mathilde pour quelques jours afin de réaliser plusieurs reportages sur son expérience. A partir de son engagement concret, nous allons explorer diverses interrogations dans cette analyse. A l’heure actuelle, qui peut bien travailler sans contrepartie financière et pourquoi ? Quelle est l’utilité ou le sens du volontariat? En outre, cette analyse positionnera l’organisation de la ferme Toivo par rapport à certains concepts ou mode de vie relatifs à la production et à la consommation. Ce texte proposera enfin plusieurs pistes d’actions pour les citoyens, inspirées de l’expérience de Mathilde.« La population mondiale passera de 7 milliards à 9 milliards d’ici à 2040, le nombre de consommateurs appartenant aux classes moyennes progressera de 3 milliards dans les 20 prochaines années, et les besoins en ressources augmenteront de façon exponentielle.D’ici à 2030, les besoins alimentaires augmenteront de près de 50 %, ceux en énergie de 45 % et ceux en eau de 30 %, en une période où les contraintes du milieu naturel réduisent de plus en plus l’offre. Cela est vrai en particulier des changements climatiques, qui ont une incidence sur tous les aspects de la santé humaine et planétaire. »[4]Groupe de haut niveau du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies sur la viabilité mondiale (2012). Pour l’avenir des hommes et de la planète : choisir la résilience. … Continuer la lecture Par rapport à cette prévision, l’ONU promeut l’approche du développement durable, un modèle de croissance économique intégrant l’égalité sociale et la viabilité écologique. Si l’accent est mis sur une répartition des richesses bénéfique à tous, la notion de croissance n’y est pas mise en question. L’intérêt général repose sur celle-ci. Il s’agit d’une évidence rationnelle pour l’ONU qui préconise de produire deux fois plus en respectant les principes de viabilité… On voit que les principaux axes du développement durable sont vécus à la ferme Toivo… Et pourtant, on pourrait rattacher la ferme Toivo à un autre courant, celui de la décroissance ou des objecteurs de croissance. Selon ce courant, la croissance, même accompagnée de l’adjectif « durable », est destructrice de l’environnement et ne peut être le socle de la justice sociale. Les objecteurs de croissance, dont l’une des figures de proue est Serge Latouche [5]Professeur émérite d’économie à l’Université d’Orsay , prônent un monde dans lequel la qualité est plus importante que la quantité, la coopération fonde les rapports plutôt que la compétition, la sobriété est la base du bien-être, en lieu et place de la consommation effrénée, amenant la croissance. [6]LATOUCHE Serge, « La décroissance comme projet politique de gauche », en ligne, consulté le 23 juillet 2012 D’après cette façon de penser, le texte de l’ONU ci – dessus, réécrit par des objecteurs de croissance, n’afficheraient probablement pas un tel fatalisme sur l’augmentation des besoins en énergie. Selon nous, le mode de vie, de production et de commerce de proximité de la ferme Toivo, correspond encore davantage à cette vision de société. Cette dernière est vraisemblablement moins largement soutenue car elle remet en question les fondements du système capitaliste, ce que ne fait pas le modèle du développement durable.
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Documents joints
Notes[+]
↑1 | Pour plus d’informations voir FISCHER Santiago, Au Festival du Film de Namur, à la découverte de l’Autre…, en ligne |
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↑2 | Le projet est soutenu par le Service Public fédéral de la Coopération au développement et par le Bureau International de la Jeunesse (BIJ). |
↑3 | Philosophe et pédagogue autrichien (1861-1925). |
↑4 | Groupe de haut niveau du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies sur la viabilité mondiale (2012). Pour l’avenir des hommes et de la planète : choisir la résilience. Présentation générale. New York. Nations Unies. |
↑5 | Professeur émérite d’économie à l’Université d’Orsay |
↑6 | LATOUCHE Serge, « La décroissance comme projet politique de gauche », en ligne, consulté le 23 juillet 2012 |